Christian Churches of God

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Genèse 22, le Judaïsme, l’Islam et le Sacrifice d’Isaac

 

(Édition 3.0 de 19980407- 20000425-20110504)

 

 

 

Ce texte se penche sur les arguments concernant le sacrifice littéral d'Isaac avancé par le Rabbin E. Ben-Yehuda, et les examine également dans le contexte de la Bible et du Qour’an ou Coran.

 

 

Christian Churches of God

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(Copyright © 1998, 2000 Thomas McElwain, éd. Wade Cox)

(Tr. 2011, 2021, rév. 2021)

 

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Genèse 22, le Judaïsme, l’Islam et le Sacrifice d’Isaac [244]

 


Dans l’ouvrage The Institute of Judaic-Christian Researcher (L’Institut de Recherche Judéo-chrétienne), Volume 1, Novembre 1986, le Rabbin E. Ben-Yehuda a publié un article intitulé The Sacrifice of Isaac (Le Sacrifice d’Isaac).

 

L'auteur ne donne qu'un seul objectif déclaré pour l'examen de cette question. "Toutes les réponses juives ont échoué devant l'affirmation Chrétienne selon laquelle l'énormité du sacrifice de Jésus sur la croix rend absolument nécessaire l’acceptation par tous les Juifs de son rôle messianique ainsi que de sa divinité. La dissertation suivante essaie de montrer que les Juifs avaient un incident au cours de leur longue histoire, bien avant la Passion, qui a eu un impact similaire sur la vision juive (page 1). La seule motivation déclarée est de "venir à bout" de cette question.

 

Le point de départ est l'idée qu'il y a une faiblesse dans la foi juive s’il n'y a pas de sacrifice pour le péché, par lequel Dieu peut accorder Sa grâce à l'humanité. "Puisque les sacrifices ne sont plus offerts dans le Judaïsme, où pensez-vous trouver la grâce de Dieu ?" (page 2). Le rabbin trouve le fondement manquant de la grâce dans le ligotage d'Isaac. "Dans la liturgie, on mentionne encore et encore du "ligotage d'Isaac" comme une cause pour que Dieu pardonne automatiquement les péchés des descendants d'Isaac" (page 2).

 

Après cette introduction, le rabbin trouve les preuves suivantes qu’Isaac a effectivement été sacrifié comme indiqué dans Genèse 22, puis plus tard, ressuscité des morts. Il est douteux qu'un Dieu omniscient aurait besoin de "tester" Abraham. Le radical N-S au lieu de N-S-H est le mot effectivement utilisé. Ainsi, la traduction de "test" est une mauvaise compréhension du texte. Il faudrait plutôt dire "emblème/bannière" ou "exemple", au lieu de "test" (page 2). Pourquoi le simple ligotage d'Isaac devrait-il être un événement aussi bouleversant que le suggère la liturgie ? (page 2).

 

“Le commentaire juif déclare que ‘Dieu Lui-même a ordonné l'offrande d'Isaac – mais Abraham permettrait-il à un simple ange d’annuler/de contredire l’ordre de son Créateur ?’” “Le commentaire explique : ‘l'ange a parlé à Abraham et Abraham a refusé de s'arrêter, disant que Dieu a commandé, Lui seul peut m'arrêter” (page 2). Le commandement de ne pas blesser Isaac signifie qu'il doit être offert entier et indemne (page 3). Les mots peuvent être interprétés comme un ‘autre bélier’ ou ‘un après-bélier’ (page 3). Tahat bno signifie sous son fils plutôt qu’à la place de son fils (page 3). "Cette chose" et "tu n'as pas épargné ton fils" dans Genèse 22:15-17 indiquent que Isaac a été sacrifié (page 3). Le texte rapporte qu’Abraham et Isaac montèrent tous deux, mais que seul Abraham est revenu (page 3). Abraham alla directement à Be're Sheva. Genèse 23:2 rapporte que Sara est morte à Kirjath-Arba. Abraham n’a donc pas pu faire face à Sara après avoir sacrifié Isaac, et Sara est morte de chagrin en apprenant la mort d’Isaac (page 3).

 

Genèse 23:2 rapporte qu’Abraham "est venu" pleurer Sara, mais aucune mention n'est faite d'Isaac (page 3). Genèse 24 décrit l'obtention d'une femme "pour Isaac", c'est-à-dire qu’Abraham susciterait une postérité au nom d’Isaac. Il n’est pas fait mention d'Isaac, mais on demande à Rebecca si elle est d'accord. Rebecca est choquée de trouver Isaac vivant, elle tombe de son chameau et se couvre le visage (page 3). Isaac est venu du chemin du puits lahay roi’, le puits de la Vie de Celui qui me voit, qui est une référence à sa résurrection (page 4). La référence à la résurrection dans les prières juives se fait au présent (page 4). Isaac a été réconforté après la mort de sa mère lors de son mariage avec Rebecca trois ans après l'événement, ce qui montre qu'il venait juste de l'apprendre lorsqu’il a été ressuscité (page 4). La pratique juive de Kidush Hashem est basée sur la mort et la résurrection d’Isaac (page 4).

 

Chacun de ces arguments est examiné dans l'ordre.

 

Il est douteux qu'un Dieu omniscient ait besoin de "tester" Abraham. Le radical N-S au lieu de N-S-H est le mot effectivement utilisé. Ainsi, la traduction de "test" est une mauvaise compréhension du texte. Il devrait plutôt dire "emblème/bannière" ou "exemple", au lieu de "test" (page 2).

 

Le radical N-S-H est utilisé 36 fois dans les Écritures hébraïques, presque toujours avec le sens clair de "mettre à l'épreuve". Les exemples sont Exode 15:25 ; 1Samuel 17:39 et 1Rois 10:1. Genèse 22:1 ne semble pas s’écarter de cet usage clair. Cependant, si le test signifie en fait que Dieu "a fait un exemple" d'Abraham, plutôt que de le "mettre à l'épreuve", le résultat ne favorise pas sensiblement une interprétation particulière du sacrifice d'Isaac. Il n'indique pas qu’Isaac a donc été effectivement sacrifié plutôt que simplement attaché à l'autel.

 

Pourquoi le simple fait de lier Isaac devrait-il être un événement aussi bouleversant que le suggère la liturgie juive ? (page 2).

 

Si la littérature juive fait continuellement référence au ligotage d'Isaac, cela appuie l'affirmation du rabbin selon laquelle l'expérience d’Isaac a eu un grand impact sur la foi juive. Il ne s'ensuit pas qu'Isaac ait été réellement sacrifié. Il ne s’ensuit même pas que la croyance qu’Isaac a été sacrifié ait jamais été répandue dans le Judaïsme. La référence liturgique citée fait état d’un "ligotage" et non d’un sacrifice réel. En tant que telle, elle va à l’encontre de la prémisse du rabbin.

 

“Le commentaire juif déclare ‘Dieu Lui-même a ordonné l'offrande d'Isaac ? - mais Abraham aurait-il permis à un simple ange de contrecarrer l’ordre de Son Créateur ?’” Le commentaire explique : “l'ange a parlé à Abraham et Abraham a refusé de s'arrêter, disant que Dieu a commandé, Lui seul peut m'arrêter.” (page 2).

 

Cet argument est basé sur le conflit entre les messages d’Elohim Dieu dans Genèse 22:1-2 et de l'ange du Seigneur dans Genèse 22:11-12. L'implication est qu’Abraham a perçu ces messages comme deux commandements contradictoires, provenant de deux sources différentes, et a choisi d'obéir à Elohim Dieu comme ayant une plus grande autorité que l'ange du Seigneur.

 

Le problème avec cette interprétation est qu'il n'y a aucun autre précédent dans les Écritures hébraïques pour l'ange du Seigneur contredisant Dieu. En fait, l'ange du Seigneur représente si étroitement YHVH qu'il parle parfois à la première personne Je comme YHVH, notez Genèse 16:10, et même moi à la fin de Genèse 22:12. La confusion linguistique entre l'ange du Seigneur et YHVH Lui-même est aggravée dans Genèse 18 où les personnages célestes ne sont jamais appelés anges, mais seulement hommes et YHVH, qui se comporte et agit comme un homme. On peut penser, au moins dans Genèse 18 et Genèse 22:12, que YHVH est une expression elliptique pour ange du Seigneur (YHVH). Dans Genèse 19, les mêmes personnages sont systématiquement appelés des anges.

 

Genèse 22:12 maintient l’accord entre Elohim Dieu et l'ange du Seigneur. Il déclare : ‘car je sais que tu crains Dieu’. En somme, le texte ne donne aucun appui à un conflit entre Dieu et l'ange du Seigneur (voir les documents d’étude L'Ange de YHVH (No. 024) ; Les Élus en tant qu'Elohim (No. 001) et La Préexistence de Jésus-Christ (No. 243)).

 

Le commandement de ne pas blesser Isaac signifiait qu'il devait être offert entier et indemne (page 3).

 

Cet argument accepte l’accord entre l'ange du Seigneur et Dieu. Les paroles de l'ange, selon cette interprétation, n'interdisent pas le sacrifice d'Isaac, mais interdisent plutôt de blesser Isaac avant le sacrifice. La signification de ces paroles serait donc qu’Isaac doit être en parfait état au moment du sacrifice.

 

Puisque cet argument est en conflit avec le troisième argument, il faut choisir l'une ou l'autre interprétation. Les deux ne sont pas acceptables. Si nous acceptons deux interprétations possibles de la première moitié du verset 12, la seconde moitié permettra de clarifier laquelle des deux est valide. Selon le quatrième argument, le sens du texte se lirait ainsi : "Ne blesse pas Isaac, car il faut que le sacrifice soit sans tâche : car maintenant je sais que tu crains Dieu, puisque tu n’as pas refusé de me donner ton fils, ton unique." Il n'y a aucun lien logique entre la première et la seconde moitié du verset. Selon l'interprétation traditionnelle, le sens du texte se lirait ainsi : "Ne blesse pas Isaac ou n’effectue pas le sacrifice jusqu’au bout : car maintenant je sais que tu crains Dieu, puisque tu ne m’as pas refusé ton fils, ton fils unique." Dans ce cas, le texte est cohérent. La première moitié interrompt le sacrifice, et la seconde moitié indique que le test est terminé, puisque Abraham n'a pas refusé son fils (voir le document d'étude L’Ange et le Sacrifice d'Abraham (No. 071)).

 

Ces mots peuvent être interprétés comme "un autre bélier" ou "un après-bélier" (page 3). L'implication est que le bélier est un sacrifice supplémentaire au sacrifice d'Isaac, puisqu’il est "un autre" ou "après". La version KJV de la Bible traduit "ahar/autre/après" comme "derrière lui" avec le pronom en italique, indiquant qu'il est ajouté. La version NIV de la Bible omet complètement le mot, disant "dans un buisson, il vit un bélier pris par ses cornes."

 

Sur ce point, le rabbin a raison. La compréhension linguistique la plus logique des mots est un autre bélier. Il est également exact qu'Isaac est la seule figure qui pourrait être le premier bélier, puisqu’il a été clairement établi qu'aucun autre animal n’a été fourni dans Genèse 22:7. Il ne s'ensuit pas, cependant, qu'Isaac a été sacrifié. Il s’ensuit seulement qu'il était un bélier à être offert en sacrifice. Le bélier pris dans un buisson était un autre animal sacrificiel.

 

Tahat bno signifie «sous» son fils plutôt que "au lieu de/à la place" de son fils (page 3).

 

Il est vrai que le mot tahat signifie sous. Il est utilisé de cette façon dans Genèse 1:7. Cependant, le mot signifie également au lieu de, et est utilisé comme tel dans Genèse 2:21 "et il prit une de ses côtes, et referma la chair à sa place". Il serait absurde de traduire sous dans ce cas. Le mot est utilisé comme au lieu de dans Genèse 4:25 ; 30:15 ; Lévitique 14:42 ; 2Samuel 19:14. Il est utilisé comme sous dans Genèse 7:19 ; Exode 32:19 ; et peut-être 1Chroniques 29:34. Il est utilisé dans le sens de pour l'intérêt de dans Exode 21:26. Il est utilisé comme moyen de dans Psaume 66:17. Il est utilisé comme vue que dans Ésaïe 60:15. Enfin, il est combiné avec d'autres particules pour d'autres significations dans le livre de Jérémie. La grande variété de sens pour le mot, et le fait qu'il soit utilisé dans le sens de sous dans une minorité de cas bibliques, va à l’encontre de la proposition du rabbin. Enfin, le sens de ‘sous’ n'a aucun sens. Si le bélier est sacrifié sous Isaac, comment était-il placé, puisqu’Isaac était déjà attaché à l'autel ? Si le bélier est sacrifié sous Isaac, alors il semble que le bélier ne soit pas ahar/un autre/un second, mais le premier. La traduction au lieu de est la seule traduction qui ait un sens linguistique quelconque.

 

"Cette chose" et "tu n'as pas épargné ton fils" dans Genèse 22:15-17 indique qu'Isaac a été sacrifié (page 3).

 

Le rabbin se réfère à l'expression dans Genèse 22:16 tu n'as pas refusé ton fils pour montrer qu'Isaac a été sacrifié. La même expression, loo chasakhtaa eth binkhaa se trouve dans Genèse 22:12. Dans Genèse 22:12, Abraham n'avait manifestement pas encore sacrifié Isaac, et pourtant il avait déjà accompli ce que signifiait ‘ne pas l'avoir refusé’. Puisque l'expression ne se réfère manifestement pas au fait d’avoir effectué un holocauste dans Genèse 22:12, il n'y a aucune raison de supposer qu'elle se réfère au fait d’avoir effectué un holocauste dans Genèse 22:16.

 

Le texte rapporte qu’Abraham et Isaac sont tous deux montés dans Genèse 22:8, mais que seul Abraham est revenu dans Genèse 22:19 (page 3).

 

Le rapport du rabbin sur le texte est exact. Le fait, cependant, que les deux sont mentionnés lors de la montée, et un seul à la descente, ne signifie pas qu’Isaac n'est pas retourné. Dans Genèse 12:14, il est dit qu’Abram est venu en Égypte. Il n’est pas dit que Saraï l’a accompagné. En fait, les versets précédents montrent qu’Abram avait peur de l'emmener avec lui en Égypte. En utilisant la méthode d'interprétation du rabbin, nous pourrions en déduire qu’au dernier moment, ils ont décidé qu'elle ne devrait pas partir, plutôt que de mentir sur leur relation. Pourtant, bien que le texte indique seulement qu’Abram descendit en Égypte, le même verset poursuit "les Égyptiens virent que la femme était très belle". Si ce n’était du verset dix-sept, où le nom de Saraï est mentionné, nous pourrions même conclure, en utilisant la méthode d'interprétation du rabbin, qu’Abram avait une femme différente et temporaire pour le voyage en Égypte.

 

Genèse 22:19 conclut qu’ils allèrent ensemble à Beer Sheba. Bien que les jeunes hommes soient également mentionnés, nous avons autant le droit de conclure qu’Isaac les a accompagnés tel que nous le faisons pour conclure que Saraï est descendue en Égypte dans Genèse 12.

 

Abraham alla directement à Be're Sheva. Genèse 23:2 rapporte que Sara mourut à Kirjath-Arba. C'est pourquoi Abraham ne pouvait faire face à Sara après avoir sacrifié Isaac, et Sara mourut de chagrin en apprenant qu’Isaac était mort (page 3).

 

Le rabbin suggère qu’Abraham est allé à Beer Sheba au lieu de retourner auprès de Sara. Mais dans Genèse 21:33, deux versets seulement avant l’ordre de sacrifier Isaac, Abraham vit à Beer Sheba. Bien que le texte ne le dise pas, il n’est pas exagéré de supposer que sa femme Sara vivait là avec lui. Genèse 21:34 indique qu’Abraham vécut à Beer Sheba pendant une longue période de temps. L'expression "beaucoup de jours" n'a pas la connotation qu’elle a en français de quelques semaines seulement. Elle est similaire à l'expression du Psaume 23:6, traduite à la fois par la KJV et la NIV par ‘pour toujours’. Il y a une rupture dans le récit avec Genèse 22:1, il est donc possible de suggérer qu’Abraham vivait à cette époque dans des régions inconnues. Mais le fait que Genèse 22:19 dise qu'il se rendit à Beer Sheba suggère fortement qu'il partit de là, et que Sara l'y attendait, à moins qu’elle n'ait effectivement attendu avec les jeunes hommes. Le texte ne mentionne pas du tout Sara, et selon le raisonnement du rabbin, comme nous le verrons, cela pourrait très bien signifier qu'elle était morte, et ressuscitée pour mourir à nouveau dans Genèse 23.

 

La meilleure façon de comprendre le texte est de supposer qu’Abraham et Sara vivaient à Beer Sheba au moins jusqu'à la fin de Genèse 22:19. Il y a une autre rupture dans le récit à Genèse 22:20, qui se poursuit au début de Genèse 23. Il n'y a donc aucune raison textuelle de supposer qu’Abraham évitait Sara.

 

Genèse 23:2 rapporte qu’Abraham "est venu" pleurer Sara, mais aucune mention n'est faite d'Isaac (page 3).

 

Le rabbin suggère qu’Isaac devait être mort car il n'est pas mentionné qu’il était présent aux funérailles de sa mère Sara. Là encore, une telle conclusion à partir de ce que le texte ne dit pas n’est pas justifiée, comme nous l'avons déjà vu. Il est clair que Sara est descendue en Égypte, même si le texte dit seulement que c'était Abraham qui est descendu. Il est clair que Sara était vivante à l’époque de Genèse 22, même si le texte ne dit pas qu'elle était présente lors d’un rite de passage aussi important que le sacrifice de son fils Isaac. Il est également clair dans le texte qu’Isaac est vivant à la mort de sa mère. Il était encore en vie dans Genèse 22:12 et dans Genèse 24:6.

 

Genèse 24 décrit l'obtention d'une femme "pour Isaac", c'est-à-dire qu’Abraham susciterait une postérité au nom d'Isaac. Il n'y a aucune introduction d'Isaac, mais on demande à Rebecca si elle est d'accord. Rebecca est choquée de trouver Isaac vivant, elle tombe de son chameau et se couvre le visage (page 3).

 

Le premier argument du rabbin est qu’Abraham devrait racheter Isaac, qui était mort, en suscitant une postérité avec une épouse pour Isaac. Cet argument est détruit par le fait que dans Genèse 24:6, Abraham ordonne au serviteur de ne pas ramener son fils Isaac dans le pays de sa parenté. L'implication est clairement qu’Isaac était vivant et que la femme était pour lui personnellement.

 

Le deuxième point du rabbin est qu'il n'y a aucune introduction d'Isaac, alors que l'opinion de Rebecca est examinée de près. Par conséquent, Isaac est mort. Toutefois, il n'est pas nécessaire de mentionner l’introduction d'Isaac, car on peut supposer qu'à l'âge mûr de quarante ans, il était très désireux de se marier. Son introduction ne doit être mentionnée que dans le cas contraire. L'enquête minutieuse de l'opinion de Rebecca n'est pas en conflit avec la pratique des mariages arrangés ou avec les normes de mariage du Moyen Orient. Penser le contraire n’est qu’un préjugé occidental.

 

Le troisième point du rabbin est que le comportement de Rebecca, qui est descendue du chameau et s’est voilée, indique la surprise de la résurrection d'Isaac. Genèse 24:64 dit qu'elle est descendue du chameau. La racine est N-P-L, qui est en effet couramment utilisée dans le sens de tomber. C’est cependant l'un des deux termes généraux utilisés pour descendre d’une monture ou d’un véhicule. Il est utilisé tel quel dans 2Rois 5:21, ainsi que dans Genèse 24:64. L'interprétation du rabbin n'est ni naturelle, ni nécessaire du point de vue linguistique. L'expérience d'une femme tombant du haut d'un chameau, qui est beaucoup plus élevé qu'un cheval, nécessiterait bien plus qu'un simple ajustement de son voile. Aujourd’hui encore, dans les régions rurales du Moyen-Orient aujourd'hui, il est d’usage qu’une femme descende de sa monture si elle rencontre un homme se dirigeant vers elle sur la route. Il n'y a rien dans le comportement de Rebecca qui montre la surprise. Au contraire, son comportement est normal, ce qui s’oppose à toute réaction de surprise.

 

Isaac venait du chemin du puits lahay roi‘, le puits de Vie de Celui qui me voit, ce qui est une référence à sa résurrection (page 4).

 

Le rabbin interprète le fait qu’Isaac vienne du chemin du puits lahay roi’ comme une preuve qu'il a été ressuscité. Cependant, les mots n'ont pas cette signification symbolique dans le texte. Ils se réfèrent à un puits d’eau littéral nommé ainsi par Agar dans Genèse 16:13-14. Le sens de Dieu qui voit est attaché à l'expérience d'Agar, et non à celle d’Isaac. Ce n'est pas du tout une preuve de la résurrection d’Isaac.

 

La référence à la résurrection dans les prières juives est au présent (page 4).

 

Le rabbin conclut que la référence dans les prières juives à Dieu ressuscitant les morts, puisqu’elle est formulée au présent, quoi qu’il veuille dire par là, puisqu’il n'y a pas de temps présent en hébreu, implique que Dieu ressuscite d'ores et déjà les morts. Puisque Dieu ressuscite d'ores et déjà les morts, Il doit avoir ressuscité Isaac. Si nous acceptons la supposition du rabbin selon laquelle Dieu ressuscite d'ores et déjà les morts, cela n’implique pas qu’Isaac est l’un de ceux qui ont été ressuscités. Il existe des références bibliques à d'autres personnes qui ont été ressuscitées des morts, notamment le fils de la veuve au temps d'Élie (1 Rois 17:17 et suivants), et le fils de la femme Sunamite au temps d'Élisée (2 Rois 4:8 ff).

 

Bien que les prières juives puissent indiquer quelque chose d'important dans la vie juive, ce qui était l'objectif de l'étude du rabbin en premier lieu, elles ne peuvent pas fournir de preuves sur le fait que le texte de la Genèse rapporte ou non un sacrifice et une résurrection réels.

Isaac a été consolé de la mort de sa mère lors de son mariage avec Rebecca trois ans après l'événement, ce qui montre qu'il venait juste de l'apprendre lorsqu’il a été ressuscité (page 4).

 

Cela ne suit pas. Il est certainement possible qu'Isaac ait pu pleurer sa mère pendant trois ans, dans la mesure où son mariage a été un réconfort pour lui. Il n'y a aucune preuve de la mort d'Isaac et de sa résurrection dans ce texte.

 

La pratique juive de Kidush Hashem est basée sur la mort et la résurrection d’Isaac (page 4).

 

Bien que la croyance en la mort et la résurrection d'Isaac ait pu avoir un impact sur certains juifs pour les inciter à être fidèles dans le martyre, cette croyance n'est guère essentielle à une telle fidélité. Cette fidélité n'est une preuve ni de la croyance en la mort et la résurrection d’Isaac, ni du fait de l'événement.

 

À ce stade, il est possible de faire une évaluation générale de l'étude. Le premier problème est le motif et les prémisses du rabbin. Son motif est faussé, et ses résultats ne peuvent qu’être biaisés. Le seul motif approprié pour l'étude du texte est de trouver la vérité, la vérité sur ce qui était signifié à l'origine par le texte et comment cela peut s'appliquer à sa propre foi et à son expérience. Le rabbin n'est pas intéressé par la recherche de la vérité, mais, selon ses propres mots, il est motivé par le désir de trouver des motifs chrétiens dans le Judaïsme. Il veut trouver un remplacement fonctionnel de la mort de Jésus sur la croix en tant que canal de la grâce divine. C’est dans ce but qu’il s'accroche au sacrifice d'Isaac.

 

La prémisse reste également non démontrée. La prémisse est que la foi dans le martyre et le ressuscité permettra automatiquement à Dieu de pardonner les péchés. Bien que cette prémisse soit acceptée par le Christianisme, un savant juif a le devoir de démontrer sa validité. Le rabbin ne cherche pas à le faire. Il accepte simplement ce point de vue Chrétien et commence à partir de là. Il s'agit d'un grave défaut méthodologique.

 

Il existe plusieurs types de faiblesses dans l'argumentation du rabbin. Tout d'abord, il y a plusieurs erreurs linguistiques. C'est comme si l’esprit informatique avait privé les chercheurs de l'intelligence linguistique de base. Choisir une seule signification d’un mot et l'appliquer de manière générale constitue une superficialité mécanique et un manque d'intégrité analytique qui auraient été impensables avant l'ère des traducteurs mécaniques. Une telle méthodologie se retrouve dans la façon dont le rabbin manipule les mots tahat (au lieu de) et tippol (elle descendit). L’utilisation qu’il fait de ces mots est une erreur flagrante pure et simple de traduction.

 

D'autres problèmes linguistiques se posent également. L’interprétation symbolique est inacceptable lorsque le texte a clairement un sens littéral. Le rabbin commet cette erreur en traitant l'expression puits de lahay roi’. Une autre erreur linguistique consiste à donner à la même expression dans le même contexte deux significations différentes, à moins que le contexte ne l'exige. Le rabbin le fait avec l'expression tu n'as pas refusé ton fils, qui apparaît deux fois dans le passage en question. Enfin, le rabbin présente des arguments linguistiques qui ne sont pas pertinents à la question comme s'ils l’étaient, comme dans son traitement du radical N-S-H.

 

Il y a aussi des erreurs de logique. Le rabbin présente des interprétations contradictoires sur le sens de Genèse 22:12 comme des preuves de la même interprétation du sacrifice d'Isaac. C'est logiquement impossible et cela affaiblit considérablement son argument. Le rabbin tire des conclusions injustifiées de choses qui ne sont pas mentionnées dans le texte : Isaac n’est pas retourné avec Abraham après le sacrifice, Isaac n'a pas assisté à l'enterrement de sa mère, et Isaac n'était pas impliqué dans les plans de son mariage. Une argumentation basée sur rien ne peut pas valoir plus que zéro. Enfin, le rabbin commet des erreurs dans la logique en tirant des conclusions injustifiées des affirmations du texte. Il tire la conclusion que Sara était à Kirjath-Arba quand Abraham était à Beer-Sheba sur la base du fait qu'elle y est morte. Les données du texte sont insuffisantes pour tirer cette conclusion.

 

Le rabbin tire des conclusions sur des hypothèses culturelles et psychologiques erronées. Il commet une erreur en concluant que la recherche des sentiments d'une femme est incompatible avec un mariage arrangé. Il se trompe en pensant qu’Isaac ne portait pas le deuil de sa mère pendant trois ans.

 

Il y a au moins deux autres failles fatales dans l'étude du rabbin. La première est la dépendance à l'égard d'un conflit entre Elohim Dieu et l'ange du Seigneur. Il n'y a aucun précédent pour cela dans l'Écriture, le texte ne l'exige pas, et cela soulève des questions théologiques problématiques pour lesquelles le rabbin ne tient pas compte. L'idée d'un conflit entre Elohim Dieu et l'ange du Seigneur est totalement inacceptable sur la base du texte biblique.

 

La deuxième erreur fatale est l'échec du rabbin d'examiner les textes qui se prononcent clairement à la mort et à la résurrection d’Isaac. Parmi ceux-ci figure Genèse 24:6, qui affirme qu’Isaac était vivant à un moment où, selon la théorie, il n'avait pas encore été ressuscité.

 

L'étude est également faussée par l’échec d'examiner les textes du passage, qui posent effectivement des problèmes. Les plus évidents d'entre eux sont Genèse 22:2 et Genèse 22:16, où Isaac est appelé le fils unique d'Abraham. Il n'y a jamais eu de moment où Isaac était fils unique d'Abraham. C'est la seule caractéristique de l'histoire qui exige le plus d’attention, et nous pouvons remercier le Rabbin Ben-Yehuda d’avoir soulevé cette question.

 

Le reste de cette étude réexaminera le texte biblique, mais dans le but d'expliquer ce qui semble être des incohérences dans ce texte. L'hypothèse de base est que le Texte Massorétique de la Bible hébraïque, au moins en ce qui concerne Genèse 22 est cohérent et peut être harmonisé avec succès avec lui-même.

 

Dans Genèse 22:2 (et dans Genèse 22:16), Isaac est appelé le fils unique d'Abraham. Cela est incompatible avec le rapport dans le Texte Massorétique de Genèse 16:15 qui indique que Agar enfanta un fils à Abram appelé Ismaël. Dans Genèse 17:17-19, il est évident qu’Ismaël était vivant avant la naissance d'Isaac. Genèse 21:2-3 rapporte la naissance d'Isaac, après la circoncision d'Ismaël à l'âge de treize ans (Genèse 17:25). Enfin, Genèse 25:9 rapporte qu’Ismaël était vivant après les événements de Genèse 22. Isaac n'était donc pas, selon le texte, le fils unique d'Abraham au moment des événements de Genèse 22 ou à un moment antérieur à ceux-ci.

 

L'histoire pose d'autres problèmes que celui du texte. Le Judaïsme interprète généralement l'histoire comme une révélation à Abraham que Dieu n'accepte pas les sacrifices humains. L'interprétation chrétienne de l'histoire met généralement l’accent sur la leçon de l'obéissance. Le Chrétien est donc confronté à un conflit théologique dans le commandement d'offrir son fils en holocauste. Un tel commandement est en contradiction avec le commandement dans Exode 20:13 : Tu ne tueras point. Bien que les théologiens puissent résoudre le problème d’une manière ou d’une autre dans leur propre esprit, la plupart des Chrétiens sont laissés dans une situation embarrassante. Ils ne peuvent pas comprendre comment Dieu pourrait ordonner à quelqu’un de tuer son propre enfant.

 

Si nous comprenons l'histoire telle qu'elle est en général – à savoir que Dieu a réellement ordonné à Abraham de tuer son propre enfant – alors il y a quelques problèmes narratifs avec l'histoire telle qu'elle apparaît dans la Bible. La conversation dans Genèse 22:7-8 ne s’inscrit pas dans le cours des événements où Abraham avait effectivement l’intention de tuer Isaac. Isaac demande où est l'agneau, comme si c'était un agneau qui allait être offert et non lui-même. Abraham répond comme si un agneau allait être offert et non Isaac. En outre, rien ne prouve qu’Abraham ait informé Isaac par la suite de la véritable nature du sacrifice, alors qu’Isaac y participe de plein gré et en toute connaissance de cause.

 

Ce que la Bible décrit en fait, c’est un événement au cours duquel un père prend son fils, se rend à un endroit isolé au sein d’un groupe entièrement masculin qui est laissé à sa garde, s’isole davantage avec son fils, procède à un simulacre de sacrifice du fils, puis sacrifie un animal en tant qu’holocauste, et retourne apparemment sans le fils.

 

Tout au long du processus, Isaac est appelé le fils unique. Il n’est appelé ainsi nulle part ailleurs dans le récit de la Genèse. Ce facteur est unique à cet événement. L'événement consiste en des actions de sacrifice et une série de déclarations ou de questions et de réponses. Le texte se présente comme cohérent, malgré l'incongruité de certains discours. Le texte ignore les problèmes théologiques de la tentation divine et du sacrifice humain, comme si ces questions n’existaient pas.

 

À ce stade, nous avons épuisé les informations bibliques. Il est nécessaire de chercher des éléments explicatifs en dehors du texte lui-même. Il y a plusieurs facteurs à rechercher. Si possible, nous devrions trouver des exemples de sacrifices fictifs de jeunes hommes par leurs pères ou d'autres autorités, suivis d’un sacrifice de remplacement d'un animal. Ces événements sacrificiels devraient inclure une série de discours, qui pourraient ignorer la situation factuelle.

 

En 1909, A. van Gennep a identifié précisément ce type de situation dans son livre Les rites de passage. Le rite de passage de ce type est pratiqué sur les garçons d'un certain âge, bien qu'il existe des rites similaires dans certaines sociétés concernant également les filles. Le rite comprend toujours des discours arrangés dans ce qu'on appelle une structure initiatique. Il y a un simulacre de mise à mort du jeune homme, un sacrifice animal de remplacement et un simulacre de résurrection du jeune homme. Il y a souvent une période de réclusion pour le jeune homme ou surtout de réclusion du sexe opposé. À la fin du rite, le jeune est passé de l'enfance à l'âge adulte, et peut se marier et adopter d’autres comportements adultes, ou bien il passe d'un statut ​​à un autre dans sa vie d'adulte.

 

Bien que la liturgie ou le rituel du rite de passage se retrouve généralement dans les sociétés non-alphabétisées, il existe des exemples de textes ayant une structure initiatique dans les différents textes religieux classiques du monde. Un d'entre eux est la première section de la Kathopanishad, l'une des Upanishads védiques connues dans les Écritures hindoues classiques. Il existe certainement d’autres précédents de structure initiatique dans les textes religieux anciens du monde entier, et il n'y absolument aucune raison de ne pas s’attendre à en trouver un dans la Bible. Il est clair que le récit du sacrifice d'Isaac contient tous les éléments essentiels d'un tel rituel sacrificiel.

 

Si l'histoire rapporte une liturgie de rite de passage, les discours sont des discours arrangés relatifs au rituel. Ils sont certes présentés comme s'étant déroulés à un moment particulier, dans un lieu particulier, avec des individus spécifiques impliqués, mais il faut comprendre qu’ils se sont produits dans le cas de chaque jeune homme dans la culture donnée, le cas échéant.

 

Le rite commence par l'initiative de Dieu, qui appelle Abraham dans Genèse 22:1. La réponse de Dieu au verset 2 est également formulée dans les phrases traditionnelles du rituel. Cela explique pourquoi Isaac est systématiquement appelé fils unique ici. Cela fait partie du rituel. Il est possible que le rituel fasse référence au premier-né de chaque femme. Le marquage des premiers-nés est une caractéristique constante dans la majeure partie de la Bible. La consécration du premier-né de chaque femme est décrite d'abord dans Exode 13 et dans des passages ultérieurs. L'expression serait généralement vraie, et ne manquerait qu’en cas de la polygamie, comme dans le cas d'Abraham. Cependant, même dans le cas de la polygamie, les mêmes mots rituels seraient attachés à l'événement sacrificiel, puisque la même liturgie traditionnelle ou les mêmes mots appropriés pour le sacrifice seraient toujours utilisés.

 

Les caractéristiques communes d'un rite de passage s’inscrivent dans le récit de la Genèse de la façon suivante. Le groupe entièrement masculin part pour un voyage de trois jours (Genèse 22:3,4). Ceux qui ne participent pas activement sont laissés à l’attente et à la garde (Genèse 22:5). La plupart des rites de passage comprennent un attirail rituel tel que le bois pour une offrande, du feu et une arme (Genèse 22:6). La plupart des rites de passage comprennent un texte standardisé de discours et de réponses entre l’officiant et l'initié (Genèse 22:7,8). La plupart des rites de passage comprennent des préparations de sacrifice et un simulacre de sacrifice de l'initié au cours duquel il est ligoté ou enfermé dans une enceinte obscure (Genèse 22:9-10). La plupart des rites de passage comprennent un sacrifice de substitution qui se trouve dans une série de discours, se substitue à l'initié, et est sacrifié (Genèse 22:11-13). De nombreux rites de passage incluent la désignation du lieu ou le changement de nom de l'initié ou, plus rarement, de l'officiant (Genèse 22:14). La plupart des rites initiatiques de passage se terminent par une bénédiction sur l'initié, son accession à l'âge adulte ou au statut approprié (Genèse 22:15-18). Certains rites de passage se terminent par l’obligation pour le jeune de trouver lui-même le chemin de la maison, afin de démontrer son nouveau statut (Genèse 22:19).

 

Le texte de Genèse 22 a été examiné du point de vue d'une structure initiatique comme rite de passage. Aucune incohérence avec cette théorie d'interprétation n’a été trouvée dans le texte biblique.

 

La réinterprétation du texte comme un rite de passage permet de rendre compte de la plupart des incohérences potentielles de Genèse 22. Les incongruités du discours, avec l'incohérence flagrante d’appeler Isaac le fils unique d’Abraham, sont considérées comme tout à fait cohérentes avec un rite de passage. L'incohérence théologique consistant à ordonner un sacrifice humain disparaît. La tentation de Dieu se réduit à l’exigence de racheter le premier-né de chaque femme, ou à exprimer qu’Abraham est un modèle pour les générations futures.

 

On peut se demander si nous avons le droit d'interpréter le texte comme une structure initiatique puisque rien dans le texte ne dit que c'est le cas. On pourrait avancer des arguments plus solides contre une autre interprétation. Interpréter le texte autrement nous laisserait avec les problèmes mentionnés ci-dessus, dont certains sont cruciaux et d’autres sont flagrants. Nous sommes en droit d'accepter une explication initiatique pour d’autres raisons que le fait qu’elle soit si répandue dans le monde entier, dans de nombreuses cultures en Australie, en Asie, en Afrique et en Amérique. Le fait que les structures initiatiques se trouvent dans d'autres textes religieux, comme le Kathopanishad, bien que certainement suggestif, ne nous pousse pas à l'accepter dans le cas d'un texte biblique. Nous sommes en droit d'accepter l'interprétation initiatique parce que le rachat des premiers-nés est ordonné dans Exode 13, et décrit et évoqué à de nombreuses reprises. Tout ce qui est ordonné et auquel il est fait allusion doit également avoir une pratique. C'est cette pratique qui est décrite dans Genèse 22.

 

Il faut mentionner que ce texte, le Sacrifice d'Isaac, a eu un grand impact sur l'expérience religieuse. L'idée fausse selon laquelle Dieu pourrait dire à quelqu'un de se livrer à un sacrifice humain a ouvert la voie à la critique de la religion dans son ensemble, d'une part, et à des cas extrêmes de pratique instable, d’autre part. Dans le Judaïsme, il semble que la morale de l'histoire soit que Dieu a enseigné à Abraham, de manière imagée, qu’Il n'acceptait pas les sacrifices humains. Ce message était si imagé que la pratique des sacrifices humains en Canaan aurait pu influencer Abraham et ses descendants.

 

Pour le Christianisme, la morale de l'histoire est que l'obéissance d'Abraham est un exemple à suivre pour tous. Tant le Judaïsme que le Christianisme ont tous deux utilisé cette histoire comme source de critique de l'Islam. Le Qour’an ([37]:103-106) [prétendument éd.] rapporte les mêmes événements pour Ismaël au lieu d’Isaac. Le commentateur mouslim pourrait considérer le “fils unique” dans Genèse 22:2 comme un vestige du vrai texte faisant référence à Ismaël, qui fut le seul à être le fils unique d'Abraham dans la vraie vie. Un tel commentateur suggérerait que le texte a été corrompu par les Juifs pour parler d’Isaac à la place.

 

Dans un scénario initiatique, les faits auraient été différents. Tant Ismaël qu’Isaac, tous deux étant le premier-né de leur mère, auraient dû être rachetés. Le Dr McElwain termine le texte par les commentaires suivants : Le rachat initiatique, le sacrifice de substitution a été accompli pour les deux. En fin de compte, le texte biblique est cohérent, et la Bible et le Qour’an ont tous deux raison. Tout le monde est désarmé et nous sommes tous confrontés à vivre ensemble en paix. Pouvons-nous relever ce défi ?

 

Il y a cependant une grave erreur dans les hypothèses concernant l'Islam et le sacrifice d'Ismaël. Le texte dans le Qour’an à la Sourate 37:103-106 ne semble pas du tout se référer à Ismaël.

 

Cette hypothèse repose sur le fait que le texte dans la Sourate 37:112 se poursuit ensuite pour parler de la naissance d'Isaac. L'hypothèse est alors faite que le texte fait référence à Ismaël et ensuite à Isaac. Le fait est que le texte fait référence à la bénédiction d'Isaac en tant que prophète des justes dès avant sa naissance. Le texte fait référence à la naissance d'Isaac, à sa bénédiction et à son statut de prophète parmi les prophètes de la Bible (avec Noé (37:79-82, Abraham (37:83 et suivants), Isaac (37:112 et suivants, Moïse et Aaron (37:120 et suivants), Élie (37:130 et suivants), et Jonas (37:139 et suivants)). Elle a été annoncée à Abraham avant sa naissance. Le fait est que la Sourate 37 n'a rien à voir avec Ismaël et est une répétition de l'histoire de Genèse 22:2 et 25:5-6, 9, 11, 12. Elle place Isaac en tant que prophète, comme l’un de ceux qui se mettent dans les rangs d'où le nom de la Sourate. La Sourate traite des fausses adorations et des dieux de ce monde, ce qui est exactement le but de l'histoire du sacrifice d'Isaac. Cette alliance avec Abraham a été le signal du remplacement du sacrifice humain sous le système de Moloch et le système Baal-Istar. Il était courant en Arabie et dans le monde en général jusqu'à ce que le culte du Veau d'Or soit éliminé par le Christianisme (voir le document d'étude Le Veau d'Or (No. 222)). L’implication d'Ismaël est entièrement due à une hypothèse selon laquelle la double référence à la naissance dans la Sourate 37:101, 112 fait référence à deux fils et donc à Ismaël et Isaac, Ismaël n’étant pas nommé. Cette hypothèse est ensuite introduite pour affirmer un conflit entre le Qour’an et le texte de la Genèse. À partir de là, l'Islam moderne affirme que les Écritures et la loi de Dieu dans la Torah ne sont pas inspirées pour justifier sa non-adhésion aux Écritures et à la Loi de Dieu. Examinons l’ensemble du texte concernant Abraham et Isaac :

99: Et il [Abraham] dit : Voici ! Je pars vers mon Seigneur et Il me guidera.

100. Mon Seigneur ! Accorde-moi la faveur des justes.

101. Nous lui fîmes donc la bonne annonce d'un fils longanime.

102 Et quand (son fils) fut assez vieux pour marcher avec lui, (Abraham) dit : Ô mon cher fils, j'ai vu dans un rêve que je dois te sacrifier. Alors Vois qu’en penses-tu ? Il dit : Ô mon père ! Fais ce qui t'a été commandé. Allah voulant, tu me trouveras parmi les endurants.

103. Puis, quand tous deux se furent soumis (à Allah), et qu’il l’eut jeté sur son visage,

104. Nous l’appelâmes : Ô Abraham !

105 Tu as confirmé la vision. Voici ! C'est ainsi que Nous récompensons les bienfaisants.

106 Voici ! C’était certes un test clair.

107 Ensuite, nous le rachetâmes avec une formidable victime.

108. Et Nous perpétuâmes son renom dans la postérité (le salut) :

109. Que la paix soit à Abraham !

110. C'est ainsi que Nous récompensons les bienfaisants.

111. Voici ! Il est l'un de nos serviteurs croyants.

112. Et nous lui fîmes l’annonce de la naissance d'Isaac, un Prophète d’entre les justes.

113 Et nous le bénîmes ainsi qu’Isaac. Et parmi leurs descendances se trouvent des gens qui font du bien, et certains qui se font manifestement du tord à eux-mêmes. (Traduction française libre de la Traduction Pickthall)

Le texte poursuit ensuite avec la phase suivante et la lignée des prophètes dans la lignée d'Abraham et d’Isaac, à savoir Moïse et Aaron (37:114). Ismaël n'est pas mentionné, ni la lignée d'Ismaël et la nation arabe. Si Ismaël est impliqué, c’est accessoire par rapport à l'objectif de la Sourate et doit être déduit même pour affirmer un rite de passage.

 

La traduction par Arberry (The Koran Interpreted, Oxford, 1964) utilise les mots ensuite pour indiquer la séquence de temps afin de développer l’argument selon lequel Ismaël et Isaac sont mentionnés l'un après l’autre, mais Pickthall n'a pas pris cette liberté de traduction. Sale (Warne and Co., pp. 336-337) semble porter une hypothèse concernant la dualité des annonces et donc de deux fils mentionnés dans sa traduction, bien qu’il n'y ait aucune raison de le faire d’après sa formulation de la traduction. En fait, c’est l’inverse qui est indiqué. La traduction de Dawood suit le texte, tout comme Pickthall et ne fait que réitérer la question qui nous occupe concernant Isaac dans 37:112.

 

Abdullah Yusuf Ali soulève un argument convaincant dans son commentaire (The Qur’an, Text, Translation and Commentary, Tahrike Tarsile Qur’an Inc, impression de 1987, p. 1205) selon lequel pendant quatorze ans, Ismaël a été le fils unique d'Abraham et à aucun moment Isaac n’a été le fils unique d'Abraham. Il soutient que cet argument avancé par le Judaïsme postérieur et le Christianisme postérieur vise à promouvoir la branche cadette de la famille, à savoir celle d'Isaac. Cependant, nous savons sans l’ombre d’un doute, grâce à l'archéologie moderne et aux textes anciens, que c’est le véritable sens et le texte des anciennes Écritures, à l'époque du Christ et que c’était le texte compris à l'époque du Prophète Qasim (appelé Mouhammad), et que c’est le texte original de la Bible.

 

Cependant, nous savons également que lors de cet événement, Ismaël et sa mère Agar avait été renvoyés, en raison du conflit entre Agar et Sara. Ainsi, Abraham se retrouvait donc avec Isaac comme fils unique, et c'est ce que signifiait ce passage de la Bible.

 

Le texte du Qour’an (Coran) n’est absolument pas en contradiction avec le texte biblique de la Genèse et constitue une preuve supplémentaire que l'interprétation du Judaïsme rabbinique, qui considère Isaac comme littéralement sacrifié, est totalement erronée. De même, la compréhension correcte révélée dans la Sourate, telle qu’elle a été comprise par le Prophète, est en accord avec le texte de la Bible. En effet, il doit en être ainsi. Cependant, si l’on affirme qu’Ismaël est impliqué, à partir de la construction du texte, alors la solution du rite de passage supprime le conflit et souligne l'exigence de l’élimination des anciens systèmes parmi le peuple de Dieu, qu’il soit arabe ou d'Israël, qu’il soit physique ou spirituel.

 

L'Alliance de Dieu est obligatoire pour la foi et pour les descendants d'Abraham, quelle que soit leur conviction religieuse.

 

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